Depuis le 23 juillet, la première meule fume. Jour et nuit, les bénévoles aguerris veillent pour qu’elle ne s’enflamme pas.
Au moment de l’allumage, les gestes sont précis.
Les charbonniers remplissent la cheminée avec des braises, des incuits
(des morceaux de bois qui n’ont pas complètement été carbonisés l’an dernier), du charbon.
Il était passé 13 heures ce samedi lorsque les premières volutes de fumée se sont échappées de la meule. Et jusqu’à ce qu’elle soit ouverte, jeudi 4 août, elle sera surveillée comme le lait sur le feu. Car pour obtenir du charbon, il ne faut pas de flamme. Avant d’être allumée, la meule doit donc être complètement étanche à l’air. Ce samedi, une quarantaine de charbonniers s’était retrouvée dès 7 heures pour le montage, qui a duré environ quatre heures : après avoir été empilé, le bois a été recouvert de mottes de terre sur la partie basse, de feuille jusqu’à son sommet et de terre, sur toute la meule.
Nuit et jour, les charbonniers se relaient pour veiller sur les meules
Au moment de l’allumage, les gestes sont précis. Les charbonniers remplissent la cheminée avec des braises, des incuits (des morceaux de bois qui n’ont pas complètement été carbonisés l’an dernier), du charbon. Les braisent se développent, la fumée apparaît. La cheminée est ensuite rebouchée, pour assurer l’étanchéité. « Ça chauffe, mais ça ne fait pas de flamme, indique Charles Schlosser, le président de l’association. On parle d’ailleurs de cuisson. Elle est progressive, du haut de la meule vers le bas. ». Petit-fils de charbonnier, il a fondé en 2000, avec quelques descendants de charbonniers, l’association pour perpétuer un savoir-faire. Et l’équipe commence à avoir l’habitude : c’est la 24ème année qu’elle monte des meules pour en extraire ensuite du charbon de bois, comme leurs aïeux – des meules avaient été montées avant la création de l’association. « En bas de la meule, les braises ne touchent pas le sol car le bois n’est pas carbonisé », décrit-il encore.
Bien que la meule cuise à l’étouffée, sans flamme donc, le tour est arrosé copieusement, régulièrement pour éviter tout risque d’incendie (*). Et surtout, par équipe de quatre, les charbonniers se relaient jour et nuit pour veiller à ce que la cuisson se passe sans danger. Au fil du temps, le bois se casse et un trou se forme alors. En créant des poches d’air, cela peut créer des flammes. Et c’est bien là tout le travail du charbonnier : repérer les éventuels trous et y remédier. « Il s’agira de remettre du bois, de recouvrir de terre et de rendre le tout à nouveau étanche », explique Charles Schlosser. Le tout rapidement : la température dans la meule oscille entre 500 et 600 degrés.
(*) « On reste actif toute la nuit, abonde Bernard Spill, vice-président et petit-fils de charbonnier également. On tourne autour de la meule à tour de rôle pour éviter les trous. »
Transmission
En journée, les charbonniers partagent avec fierté leur savoir-faire. Et se chargent de le transmettre à la jeune génération. Ce dimanche sera d’ailleurs monté la meule des enfants. Pour ceux qui auraient loupé le processus du montage de meule, une seconde sera encore montée et allumée mercredi 27 juillet au matin. Mais le moment fort de cette saison sera sans doute la célébration, vendredi, du 25 e anniversaire de l’association des Charbonniers d’Europe.
texte et photos : DNA / Franck KOBI / Guillemette JOLAIN